La grande fête des arts
Si la politique est centrale dans la Fête de l’Humanité, l’art prend rapidement une importante place. Déjà en 1932, 250 musiciens et choristes jouent l’Internationale pour clôturer l’événement.
En 1938, L’Humanité présente son nouveau programme :
"Après la projection de films militants sur les luttes du peuple espagnol, le tour de France de L'Humanité ou de dessins animés de Walt Disney, on peut assister à des danses et ballets, et applaudir les chanteurs. Quatorze danseurs de l'opéra participent au ballet. Et la grande vedette de la chanson, Charles Trenet, qui, la nuit venue, clôturera cette fête, rencontre un gros succès”
C’est alors le point de départ d’une programmation de plus en plus spectaculaire, faisant vivre aux participants une expérience inédite chaque année.
Partons à la découverte des arts à travers la Fête de l’Huma !
La Fête de l'Humanité de 1982 depuis sa grande roue !
La fête forraine de l'Huma
L’ambiance de fête foraine de la première édition a persisté au cours des décennies. Le "Chamboule tout" devient un exutoire phare de la Fête, où le visiteur peut sans retenue s’en prendre aux patrons ou aux opposants politiques. De plus, on trouve dès les années 1960 des manèges à sensations, comme l’indémodable grande roue, des Grands Huit, des auto-tamponneuses et d’autres attractions renversantes encore présentes aujourd’hui.
La Fête de l'Humanité 1966, véritable parc d'attraction
Le Grand Huit à la Fête de l'Humanité 2016
Les idoles de jeunes
Évidemment, la Fête est surtout reconnue pour sa grande programmation musicale. La liste des artistes ayant foulé les trois scènes de l’Huma est sans fin. Pourtant, certaines prestations ont davantage marqué les esprits. Tout d’abord, la programmation musicale rassemble de plus en plus de têtes d’affiche, en particulier des chanteurs et chanteuses issus de « Salut les copains », ce qui attire un public plus jeune tout au long des années 1950-1960, avec Jacques Brel, Léo Ferré, Annie Cordy ou encore Catherine Sauvage et Eddy Mitchell.
“L’esprit Seventies” bouleverse la programmation : la jeunesse demande du rock et l’Humanité répond à leurs souhaits. Des grands groupes internationaux sont invités, comme les Pink Floyd (1970), The Who (1972), Deep Purple (1977) et Génesis (1978). Un vent de Woodstock souffle sur la programmation. Le concert de Chuck Berry marquera l’édition 1973 en déclenchant une bagarre générale aux pieds de la scène centrale par des Hells Angels.
Les Who enflamment à la Fête de l'Humanité 1972
Leonard Cohen en concert en 1974 à la Fête de l'Humanité
James Brown en concert en 1982 à la Fête de l'Humanité
Les Kinks en concert en 1974 à la Fête de l'Humanité
Article de presse après la bagarre durant le concert de Chuck Berry en 1973
Dès les années 1980, l’Huma ouvre ses portes à de nouveaux styles musicaux, plus diversifiés. Par exemple, l’année 1991 programme Johnny Hallyday, Pigalle, IAM, Michel Fugain et Massilia Sound System : tout le monde y trouve son compte et l’émerveillement est à son paroxysme.
Johnny Hallyday à la Fête de l'Humanité 1985
Pigalle à la Fête de l'Humanité 1998 !
Johnny Hallyday en concert en 1991 à la Fête de l'Humanité
Johnny Hallyday en concert en 1991 à la Fête de l'Humanité
Renaud en concert en 1985 à la Fête de l'Humanité
Johnny Hallyday en concert en 1991 à la Fête de l'Humanité
La grande scène Angela Davis
Les groupes sont de plus en plus nombreux à enflammer les scènes de l’Huma, avec plus de 50 concerts par édition aujourd’hui. Rappelons-nous l’édition 2023, où Angèle, Bigflo & Oli, Mass Hysteria, Dub Inc, Rebeka Warrior ou encore les Vulves Assassines ont fait danser les participants durant trois jours intenses.
Big Flo et Oli à la Fête de l'Humanité 2023
Les Vulves Assassines à la Fête de l'Humanité 2023
Aftermovie à la Fête de l'Humanité 2019
Le Village du Livre
Le village des Intellectuels
La place de la musique, et plus généralement de la culture, y est aujourd'hui prépondérante. Mais d’autres festivités se côtoient aussi à l’Huma, comme en témoignent le village du Livre, les nombreux spectacles d'arts vivants, les projections cinématographiques, les expositions artistiques mais également plus d'une centaine de débats, tables rondes et conférences.
La littérature s’invite ainsi comme un art à part entière dès 1965 avec la Cité du livre. Louis Aragon y dédicacera nombre de ses ouvrages à chacune de ses venues. Ce chapiteau sera renommé le “Village du Livre” quelques années plus tard.
L'exposition Picasso et l'accrochage des photographies des correspondants à la Fête de l'Humanité
Un musée à l'Huma
Tel un musée à ciel ouvert, des expositions sont régulièrement programmées aux côtés des concerts. La première ouvre ses portes en 1930, relative à la mort de Jean-Jaurès et de Lénine, à la mutinerie des soldats du 17e de Narbonne en 1907 et aux grèves du Nord de 1916. Construite à partir des archives des militants, elle marque le début d’une belle tradition des arts visuels à la Fête. Plusieurs grandes expositions verront par la suite le jour, notamment en 1966 avec l’accrochage d’œuvres de Picasso ou encore de Fernand Léger. Ainsi, une grande exposition posthume rendant hommage à Picasso eut lieu en 1973, avec plus de 136 œuvres venues de Leningrad, Moscou, Prague, ou prêtées par des musées français et des collectionneurs particuliers. L’année suivante accueillit un musée éphémère de l’impressionnisme avec, au premier plan, Monet.
Les impressionnistes à la Fête de l'Humanité - Archive INA
Vive le cinéma
Le 7e art est bien sûr présent dès la Libération sous un grand chapiteau intimiste, où sont projetés des films engagés. En 1948, un film en couleur sur le 800e anniversaire de Moscou est à l’affiche. En 1957, c’est au tour de Charlie Chaplin avec Les Temps modernes, qui fait salle comble. En 1992, on y retrouve une partie de l'équipe du tournage du film Germinal, avec Gérard Depardieu et Renaud, venue en faire la promotion. La Fête développe depuis une dizaine d’années des partenariats avec des chaînes de production, permettant la projection régulière de documentaires d’Arte suivie de ciné-débats avec les comédiens et producteurs.
"Germinal" à la Fête de l'Humanité - Archive INA
Spectacle de cracheurs de feu à la Fête de l'Humanité
Spectacle de clowns à la Fête de l'Humanité
De Molière aux fanfares locales, en passant par Yves Saint Laurent
Les arts vivants sont évidemment présents chaque année depuis la création de la Fête, touchant à tous les registres. Les grands classiques sont joués sur les scènes, comme la représentation des farces de Molière par le Théâtre indépendant de Clément Harari en 1948. Le spectacle Aragon Théâtre est présenté en clôture de la fête de l'Humanité le 12 septembre 1982. Cette création retrace la vie de Louis Aragon, lui rendant hommage deux mois avant sa mort. Elle marqua nécessairement les esprits, car comme nous l’avons évoqué précédemment, l’écrivain communiste était un grand habitué de la Fête de l’Huma. Aux côtés de ce registre classique déployé dans la programmation, les visiteurs peuvent admirer les troupes itinérantes dans les rues, des spectacles de clown, des cracheurs de feu ou les indémodables fanfares rythmant l’événement depuis sa création. Plus étonnant encore est la Fête de l’Huma de 1988 où la haute couture française s’invite en ouverture pour célébrer le bi-centenaire de l'événement. Le défilé d'Yves Saint Laurent est un vrai succès. « La grâce et les larmes. Un rêve est passé par La Courneuve, merci monsieur Saint Laurent », signe L’Humanité. Ainsi, la Fête de l’Humanité foisonne d’art et de culture depuis sa création. L’art y est pluriel et toutes ses formes, de la plus classique à la plus avant-gardiste, s’y trouvent représentées.
Un défilé des modèles du couturier Yves Saint Laurent devant 50 000 personnes à la Fête de l'Humanité 1988
La musique engagée
L’art se veut militant à la Fête de l’Huma. Rappelons-nous de la polémique lors du concert du rappeur Soso Maness en 2021, défrayant la chronique après avoir invité la foule à chanter le slogan anti-police « Tout le monde déteste la police ! », après avoir critiqué le film Bac Nord de Cédric Jimenez. L’art de la Fête de l’Humanité dénonce, et la programmation n’est donc pas anodine : les artistes présents défendent des valeurs communes de la gauche.