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Introduction

En résulte que les fouilles archéologiques se limitent longtemps aux sites élitaires renseignés dans les textes, la culture matérielle médiévale, dont font partie les objets métalliques, est reléguée au second plan. Néanmoins, si c’est le cas en France, ça ne l’est pas nécessairement dans d’autres pays d’Europe. En Europe de l’Est et principalement, en Russie, la culture matérielle a eu droit à une institution qui lui a été en partie dédiée, à savoir, l’Académie d’Histoire de la culture matérielle, fondée par Lénine en 1919. Bien que porteuse d’idéologie politique et servant une certaine propagande, l’Académie voit dans l’étude des artefacts, un moyen d’étudier les périodes du passé, la vie quotidienne de différentes populations, les échanges et les rapports sociaux entre ces derniers. Cette manière d’appréhender le matériel archéologique au-delà de sa simple apparence a eu une influence jusqu’en Italie.

À l’Ouest, en Angleterre, l’étude du matériel médiéval a grandement bénéficié d'importantes fouilles archéologiques conduites à Londres, à partir de la fin des années 70. Une collection d'ouvrages étant consacrée aux objets excavés lors des réaménagements des berges de la Tamise a permis d'étoffer très largement la littérature scientifique sur le sujet.

On pourrait alors s’étonner, qu’au centre de tout cela, la France soit restée aussi
imperméable à ce genre d'études. Et pourtant, ce fut le cas pendant encore une trentaine d'années. Comme dit précédemment, la culture matérielle fait bien souvent l’objet d’un simple catalogue d'objets. D'ailleurs, on peut ajouter à ce propos la présence minime d'objets médiévaux ou le peu d’expositions tournées vers le Moyen Âge dans les structures muséales françaises. Les collections sont soit limitées, soit peu mises en valeur quand il s’agit d'objets médiévaux. On peut également souligner le peu d’artefacts archéologiques exposés au musée de Cluny, consacré au Moyen Age. L’intérêt est ici porté sur l’aspect esthétique des œuvres exposées, ces dernières se limitant, en majorité, à des représentations figurées ou des décors architecturaux.

S’il peut être inesthétique, l’objet tardo médiéval a, toutefois, son utilité dans la recherche archéologique. Son caractère datant a longtemps été ignoré au profit de la céramique. Et pourtant, les objets métalliques ont, eux aussi, connu des évolutions au fil des décennies et des siècles qui permettent de donner des jalons chronologiques à une stratigraphie. De plus, les objets en métal, comme toute découverte archéologique, sont un témoignage d’une époque passée. L’étude d’un ou plusieurs objets peut contribuer à élargir nos connaissances sur de nombreux aspects, que ce soit sur les productions, les techniques de fabrication, les usages, etc. Mis en relation avec le contexte et les autres sources disponibles, l’étude de ces objets a donc beaucoup à apporter dans la compréhension des sites, de leurs activités ou leur nature, mais aussi sur leurs occupants, leurs statuts et les dynamiques sociales en jeu. C’est ce que tendent à montrer les ouvrages et les colloques réalisés récemment sur le sujet. On peut, notamment, citer le colloque qui a eu lieu à Caen en 2015, sous la direction de Luc Bourgeois et centré sur la question de la culture matérielle dans la recherche archéologique médiévale.

Ainsi, l’étude qui va suivre, se penchera sur une collection de matériaux métalliques du bas Moyen Âge. Ces objets ont été découverts dans le Castrum de DommeVieille (dit, le Château du Roy). Le site a été en activité entre le XIIIe et le XVIe siècle et fut le témoin de plusieurs conflits ayant eu lieu dans un périmètre géographique rapproché. Le château, aujourd’hui à l’état de ruine, fait l’objet d’une fouille programmée depuis 2019. Une recherche documentaire a également été effectuée révélant un grand nombre de sources mentionnant le castrum. Depuis le début des fouilles, de nombreux objets en métal ont été excavés. Notre étude s’intéressera uniquement à ceux découverts durant la campagne de 2021. Le corpus se compose de 152 objets de natures et d’époques différentes.

Notre étude visera à décrire et inventorier tous ces objets, mais également à les replacer dans la chronologie du site. Cela pourra permettre de voir l’évolution du site et les événements qui s’y sont déroulés à travers un point de vue différent, celui des objets en métaux. Nous nous demanderons, donc, ce que nous révèle le mobilier métallique du château du Roy quant à sa chronologie et à son époque.

Dans un premier temps, notre travail consistera à replacer le château dans son contexte géographique et historique. Nous balayerons l’ensemble de nos connaissances sur l’histoire du Château du Roy. Dans cette partie, nous aborderons l’historique des opérations archéologiques qui ont touché le castrum depuis 2016.
Dans un second temps, nous nous attacherons à la description du corpus. Dans cette partie nous reviendrons sur les différents types d’objets que rassemble la collection. Nous verrons comment ils se répartissent quantitativement et typologiquement. Nous évoquerons, aussi, leur répartition spatiale, sur le site du Château du Roy et chronologique, dans son histoire.
Enfin, la dernière partie sera consacrée à une étude plus approfondie des différents objets en les répartissant selon leurs natures. Nous nous attarderons sur certains objets pourvus de caractéristiques particulières permettant de les replacer dans la chronologie et apportant, par conséquent, des éléments supplémentaires à notre compréhension de l’histoire du château. Nous nous pencherons également sur le caractère singulier de certaines des découvertes de Domme.