C'est quoi le merveilleux ?

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Peinture représentant la fée Morgane préparant des potions dans son atelier, par Frederick Sandys en 1864.

Pour comprendre cette thématique, il est important de connaître l’origine de la terminologie. Le terme merveilleux ou merveille apparait au XIe siècle et est issu du latin mirabilia ou mirabilis qui signifie des « choses admirables ou étonnantes ; miracles ». L’académie française utilise ainsi cette étymologie pour désigner tout ce qui emprunte au domaine du surnaturel, de l’extraordinaire. Le merveilleux c’est donc tout ce que l’on n’a pas l’habitude de voir dans la réalité ou qui n’ont jamais existés, c’est-à-dire relevant de l’imaginaire.

Ce sous-genre du conte trouve une partie de son origine dans le merveilleux chrétien, lui-même utilisant les histoires légendaires et héroïques pour faire exister un discours surnaturel, tel que les légendes arthuriennes avec les personnages de la fée ou du sorcier. Il permet ainsi un passage du fantastique au merveilleux. Pour Michel Fournier, l’utilisation du merveilleux dans les contes « participe ainsi d’une forme d’encadrement des croyances superstitieuses. Il permet également de quitter l’univers de la légende, qui entretient des liens avec l’espace des croyances, pour inscrire l’imaginaire dans l’économie moderne de la fiction, qui fait du monde fictionnel une entité séparée du monde réel ».

Le conte, comme support a finalement pour objectif d’encadrer l’imaginaire et les croyances permettant aux hommes à la fois d’être rassurés face à des choses qu’ils n’ont pas l’habitude de voir et qui pourrait les effrayer, en d’autres termes de les expliquer, mais c’est aussi un moyen d’échapper à la réalité et de faire vivre des croyances.

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Peinture représentant les songes d'une nuit d'été, dont le personnage principal est une fée, par Henry Fuseli, ca. 1790.

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Cette gravure illustre l'histoire d'une course entre Olaf et son frère Harald Haardrade pour conquérir la Norvège. Dans celle-ci apparaissent de petites créatures appelées Elfes. Par George Pearson, reprenant le dessin original de W. J. Wiegand, en 1871.

Bien que ce sous-genre puisse être compris et utilisé par les adultes, il reste tout de même associé au monde de l’enfance puisque le merveilleux, par ses excentricités, est contraire à la perception réaliste du monde qu’on les adultes, il se « distingue de l’univers de la raison des adultes ».

Maintenant que le merveilleux, aussi utilisé comme synonyme du conte de fée, a été définit comme sous-genre du conte, permettant de faire vivre des éléments surnaturels et imaginaires (qui n’existent pas), par quoi est-il concrètement représenté ?

Pour Tolkien, par exemple, le merveilleux c’est surtout le personnage de la fée ou des elfes évoluant dans la nature et en cohabitation avec les hommes, des créatures magiques apparaissent généralement dans le folklore anglais.

Néanmoins, comme tous personnages et créatures merveilleuses, la définition des fées ou des elfes est différente en fonction de chaque auteur, l’imaginaire étant sollicité, celui-ci varie, étant donné qu’il est ancré dans un spectre très large. A titre d’illustration, la fée peut être ou non une créature minuscule, affublée d’ailes et, en fonction de l’histoire racontée, bonne ou mauvaise.

Pour Jean-Paul Sermain, historien du XVIIIe siècle et spécialiste du conte de fées, le merveilleux ne désigne pas uniquement les fées mais plutôt tous les “intervenants” étant la plupart du temps des “héros dotés d’une puissance surhumaine”, quant aux fées, celles-ci ne sont merveilleuses que si elles possèdes des “pouvoirs illimités”. Ainsi, le merveilleux pour lui, va au-delà du simple dépassement de la nature humaine. Il analyse également le merveilleux dans les contes comme un moyen de se débarrasser de toutes les contraintes que pose le monde réel, humain, et avec lui le contexte politique.

En effet, le merveilleux relevant de l’imaginaire de chacun, celui-ci n’existe pas sans l’imaginaire, tout devient possible : du changement d’identité aux pouvoirs magiques, en passant par des héros surpuissants et des créatures irréelles.

Quant à Emmanuelle Sempère, le merveilleux se forme grâce aux traditions, elles-mêmes entremêlées avec le contexte moderne dans lequel il est créé, à l’esthétique et à la spiritualité.

Enfin, il est important de prendre en compte que dans les récits retranscrits par les frères Grimms, le merveilleux tend à se cacher dans la nature même. Ce sont en effet, les animaux ou la végétation qui semble doté de pouvoirs surnaturels, tantôt ils viennent en aide au protagoniste et tantôt ils ont leur propre faculté de réflexion et de pensée puisqu’ils sont chargés d’effectuer les punitions imaginés pour les villains de l’histoire.

A gauche, une illustration de la place de la nature, la végétation et le loup semblent être possédés de raison. A droit, une fée tenant une baguette à la main.

L’autre apparition du merveilleux dans ces récits se fait par le biais d’un objet magique, le plus célèbre d’entre eux étant la baguette magique des fées. Généralement, il vient en complément d’un personnage déjà doté d'habiletés hors du commun et ne fait que renforcer son caractère merveilleux, une fée est dans une grande majorité des cas munie d’une baguette qui vient amplifier son pouvoir.