La figure de la princesse dans les contes

Raiponce du haut de sa tour laisse pendre ses longs cheveux blonds, par Frank Cadogan Cowper en 1908.
La beauté et la chevelure
Dans ces récits, la princesse est aussi et premièrement un personnage d’une beauté exceptionnelle, celle-ci est même vue comme une composante de son identité, puisqu’à cela sont généralement associées des qualités morales telles que la modestie ou la bienveillance. Elles sont faites pour être belles puisque sans cette beauté, elles n’ont aucune légitimité à avoir une histoire. En effet, de cette beauté découle une appartenance ou un accès à la noblesse, qui lui confère son statut et donc sa valeur. Son seul mérite à être sauvée c’est sa beauté, et tout ce qu’elle sous-entend, qui lui donne une histoire.
Cette beauté est principalement signifiée par un élément, commun à toutes : la chevelure, qui symbolise la beauté et la féminité. Sans cette chevelure, la princesse n’est pas belle et n’a aucun intérêt. Leur cheveux sont généralement longs et blonds, d’une couleur éclatante, décrite comme une chevelure d’or. Cette comparaison, souvent faite dans les contes, font leur valeur inestimable, ils sont considérés comme de véritables bijoux. Dans les descriptions, ils paraissent en dehors du réel, ils font partie intégrante de l’image du merveilleux que le conte confère.
Néanmoins, à l’instar de Raiponce, princesse de contes qui symbolise peut-être le mieux cet idéal de la princesse aux cheveux d’or, il est possible de trouver certaines princesses qui ne rentrent pas dans cet imaginaire de la chevelure. Ainsi, le meilleur exemple est sans doute Blanche-neige, dont la chevelure est bien décrite comme étant “noir comme l’ébène”. Bien que les cheveux blond ne soient pas utilisés dans ce conte, ils sont tout de même convoités car ils font partie des caractéristiques de beauté qui définissent cette princesse, c’est même l’une des seules princesse avec une description physique plus poussée.
Si les cheveux ne sont pas semblables aux autres descriptions de princesses ils revêtent tout de même une importance majeure dans la construction du personnage puisque faisant partie intégrante de sa description et étant le point de départ du récit. En effet, c’est cette chevelure qui est convoitée par sa belle-mère, permettant, avec ses lèvres et la couleur de sa peau, de la rendre magnifique
Bien que la chevelure de la princesse soit décrite de façon très détaillée et avec de nombreuses comparaison, c’est le seul élément qui permet de comprendre et de se représenter la beauté de cette jeune femme. Dans la plupart des récits merveilleux, aucune caractéristique physique ne vient compléter la description de de cette chevelure, et permet d’insister sur l’importance de ce détail.
La jeunesse
Bien souvent, la princesse est une jeune femme, voire jeune fille qui attire la jalousie et les convoitises. A son jeune âge est lié sa beauté. Ainsi, ce que ce n’est pas uniquement la beauté qui crée de la jalousie, souvent d’une parente, c’est aussi sa jeunesse. La quête de cette jeunesse, et par conséquent, la beauté rappelle les envies de vie éternelles. Ce sont toutes les princesses imaginées par Perrault, les frères Grimms et même Andersen qui sont imaginées de la même manière. Quelles aient des caractéristiques physiques plus ou moins différentes ne change en rien la mention et l’attention que l’on porte à ce jeune âge où les femmes sont vues comme étant la meilleure version physique d’elle-même possible. Que ce soit Cendrillon, Blanche-neige, la Belle au bois dormant, la belle et la bête ou encore Raiponce, toutes sont jeunes et belles et donc attirent convoitise et jalousie de la part de proches parentes qui souhaitent retrouver cet état dont elles ne bénéficient plus, selon la société.
Peau d'âne à gauche, la petite sirène au centre et Cendrillon, essayant la pantoufle, sur la droite.
Il faut cependant prendre en compte que chaque conte et chaque princesse ont des caractéristiques qui leur sont propres, que cela soit dans leurs histoire ou dans les représentations qui leur sont accordées. Ainsi, toutes leurs histoires sont différentes, mais leur caractère également, dans beaucoup d’histoires, elles ne sont pas juste belles. Il est possible de voir d’autres traits de personnalités être mis en avant par les auteurs. La petite sirène par exemple, n’est pas uniquement jeune et belle, il est aussi mis en avant par les frères Grimms son intelligence, sa résilience et sa curiosité. Peau d’Âne, quant à elle, sait user de la ruse pour échapper à son père.
La délivrance et l’attente
Outre les caractéristiques physiques, elle se distingue surtout en étant un personnage qui a besoin d’être sauvée. Cet acte, qui prend souvent la forme d’un emprisonnement physique, la princesse est généralement emmurée, et sa délivrance ne peut être effectuée que par un prince, étant digne du rang de ces jeune filles. Raiponce par exemple, est enfermée dans une tour, Blanche-neige après s’être enfui, reste quant à elle enfermée dans la maison des nains. Cendrillon n’échappe pas non plus à ce destin similaire, bien qu’elle sorte pour aller au bal, elle est tout de même cloîtrée dans la maison de sa marâtre jusqu’à ce que le prince vienne l’en sortir.
Représentation ci-dessus, du conte du Prince grenouille, dans lequel la jeune fille vient de récupérer la balle au fond du bassin.
Les princesses, dans leur récit, sont bien souvent très seules et attendent cette délivrance par le prince. Bien qu’elles soient dotées de caractéristiques plus leur seule beauté, elles sont loin d’être actives dans leur propres récits. Certes, elles agissent dans le peu de liberté qui leur est octroyé mais elles sont souvent rattrapées par leur éducation, les promesses qu’elles ont pu faire ou les conventions sociales. Elles sont si limitées qu’elles n’ont pas réellement le choix des actions qu’elles subissent. Il est possible de citer le prince grenouille et la balle d’or, par exemple, récit dans lequel la princesse est obligée par son père de respecter son engagement envers la grenouille. Ainsi, elle se retrouve à attendre passivement, subissant les obligations de sa famille alors qu’elle avait, au début, pris une décision. Même quand les princesses osent s’affirmer et déroger à cette règle de l’attente, elles sont rattrapées par une force, souvent extérieure, subissant une solitude imposée.
Peau d’Âne est un autre exemple qu’il est possible de citer, cette jeune femme ayant été obligée de fuir son père qui voulait se marier avec elle, attend patiemment que quelqu’un vienne la délivrer. Cette attente et passivité peut tout de même être, dans certains cas poussée à l’extrême, où les princesses ne disposent pas d’une conscience dans cette partie du récit. C’est par exemple le cas de la Belle au bois dormant qui subit 100 années de sommeil le temps d’attendre que le prince la réveille.
Peau d'âne à gauche, la belle au bois dormant au centre et Raiponce du haut de sa tour. Toutes trois sont dans des positions passives et attendent d'être libéré du mauvais sort et de leur histoire.
La quête de l’amour
La délivrance par un homme, bien qu’étant un personnage souvent secondaire dans le conte de la princesse, lui permet d’arriver à sa finalité : la quête de l’amour. La quête du prince est de délivrer la princesse, mais la quête de la princesse, tout au long du récit, c’est de trouver l’amour qui arrive avec le prince. En effet, tout au long du conte, celle-ci n’a rien à faire puisqu’elle est positionnée dans un rôle très passif. Le récit raconte la solitude et la malédiction de la princesse, sans oublier de décrire sa beauté, mais elle n’est aucunement chargée de remédier elle-même à sa situation.
Prenons l’exemple de raiponce, celle-ci est envoyée dans le désert, après que la sorcière ait découvert que le prince lui avait rendu visite, et attend le reste de l’histoire que ce dernier la retrouve. Quant à Cendrillon, même si elle a pris la décision de se rendre au bal, une fois celui-ci passé, elle attend et espère l’arrivée du prince. Dans le récit de la petite sirène, la princesse n’a comme unique quête celle de l’amour même si elle ne finit pas par épouser le prince. Tous les sacrifices, la douleur qu’elle traverse et son histoire sont écrits dans le but de retrouver le prince, bien que ce ne soit pas celui-ci qui la délivre de son malheur.