La figure du monstre
The Giant lying dead at the foot of the Beanstalk, Fredrick Warne, 1880
La fée Carabosse arrive au baptême de la princesse, Harry Clarke, 1922
La reine ogresse se jette dans la marmite remplie de serpents et de bêtes sauvages, Albert Robida, 1897
Gravure colorisée de Barbe Bleue, Gustave Doré, 1862
Le dernier élément thématique que nous souhaitons présenter est la question du monstre. Ici le merveilleux n’est pas bénéfique pour le héros. Personnage dangereux et effrayant, il prend souvent la forme de l’ogre. Opposé au héros, le conte s’achève souvent par sa mort, obstacle à affronter.
La multiplicité des personnages monstrueux
Le monstre est multiforme. Dans les contes de fées, il apparaît sous plusieurs avatars aux caractéristiques très similaires. Tout d'abord l'usage de la magie. Que ce soit une sorcière ou un géant habitant sur un nuage, le personnage monstrueux a un avantage sur le héros. Grâce à la magie ou à un don extraordinaire il est en mesure de le surpasser.
De plus, ces personnages monstrueux s'opposent toujours aux héros. Ils inspirent la crainte auprès des personnages de contes. Notons enfin que leur goût du sang, notamment chez les ogres et ogresses, les poussent à tuer et à manger les hommes. Ce sont des monstres intégrés à la société humaine.
Hansel pousse la sorcière dans le feu, Otto Kubel, 1930
La mort douloureuse des créatures monstrueuses, une vengeance sur leur méchanceté
Nous voulions nous arrêter un instant sur la façon dont meurent ces personnages monstrueux. Si les contes ne s'achèvent pas toujours par leur mort, cette dernière est souvent violente et douloureuse. C'est une manière pour le conteur de repousser ces monstres en les faisant souffrir à leur tour. Dans Hansel et Gretel, c'est la sorcière qui finit par brûler dans le four où elle souhaitait cuire les deux enfants. Le conte regorge d'expressions évoquant la cuisson et la faim de la sorcière. Le châtiment qu'elle souhaitait faire subir se retrouve être le sien.
Gilles de Rais, l'inspiration pour Barbe Bleue ?
Compagnon de Jeanne d'Arc, célèbre pour ses exploits chevaleresques, Gilles de Montmorency -Laval dit Gilles de Rais a tout pour incarner une figure princière d'un conte de fées. Pourtant, sa légende noire tend à l'associer à l'ogre le plus cruel de l'œuvre de Perrault : la Barbe Bleue.
Héritier de nombreuses provinces de l'ouest du Royaume de France, il se rallie à Charles VII et se bat contre les Anglais durant la guerre de Cent Ans aux côtés de Jeanne d'Arc. Il participe à la levée du siège d'Orléans et est nommé Maréchal en 1429. Ces actes de bravoure ne s'effacent cependant pas entièrement face aux nombreuses accusations contre sa personne. En 1440, suite à son coup de force pour prendre le château de Saint-Étienne-de-Mer-Morte, il est capturé et traîné devant le tribunal ecclésiastique. En effet, la justice inquisitrice cherche à le confronter aux accusations de meurtres et de viols sur plus d'une centaine d'enfants. Condamné à mort, il est longtemps considéré comme l'inspiration de Charles Perrault pour Barbe Bleue.
Pour achever cette section, prenez-le temps de visiter le château de Gilles de Rais. Qui sait, vous croiserez peut-être la Barbe Bleue.
Gilles de Rais, Eloi Firmin Féron, 1835, Château de Versailles