GPC Groupe 4

La commande de Borghèse

    

Entre 1619 et 1625, Le Bernin réalise quatre de ses œuvres les plus connues : Enée, Anchise et Ascagne, L’Enlèvement de Proserpine, David ainsi qu’Apollon et Daphné. Ces quatre sculptures ont été commandées par le cardinal Scipion Borghèse, pour décorer la villa familiale. Aujourd’hui, ce groupe dit « de Borghèse » est conservé à la Galerie Borghèse à Rome.

    

    


Enée, Anchise et Ascagne

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Le Bernin, Enée, Anchise et Ascagne, 1619

Enée, Anchise et Ascagne est le premier groupe sculptural monumental du Bernin pour la villa de Scipion Borghèse. Ce thème représente la fuite d'Enée de Troie vers l'Italie après la défaite de la ville. Le héros troyen a été contraint de fuir avec son père Anchise sur ses épaules, son fils Ascagne et sa femme Créuse (la seule à ne pas être présentée dans le groupe du Bernin). Cet épisode, tiré du deuxième livre de l'Enéide de Virgile a une signification historique et religieuse très importante à l'époque du Bernin, représentant l'importance de la lignée et des trois âges de l'homme. 

Comment le Bernin représente-t-il cet épisode ?

Le père, le fils et le petit-fils sont représentés. Anchise est sur l'épaule d'Enée et Ascagne les suit, tels que rapporté dans le récit de l'Enéide. Le Bernin effectue un réel travail sur la peau des personnages, plus ou moins ridée, plus ou moins vigoureuse, pour retranscrire la différence d'âge. Anchise tient dans sa main gauche l'urne contenant les ossements de ses ancêtres et Ascagne tient le feu éternel de Vesta. Le Bernin représente donc à la fois les générations se succédant et l'union de la jeunesse et de la vieillesse faisant la force de la lignée. Cette œuvre réalisée pour le cardinal Scipion Borghèse est aussi une représentation de l'histoire familiale du commanditaire. Le Bernin montre en effet par ce groupe comment Scipion Borghèse a soutenu son oncle âgé, le pape Paul V.

   

D'un point de vue technique, cette œuvre peut être qualifiée de virtuose tant le déséquilibre de la position des personnages menace la stabilité de l'ensemble. Le Bernin relève ce défi avec succès.

    


L'Enlèvement de Proserpine

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Le Bernin, L'Enlèvement de Proserpine, 1621-1622

L'Enlèvement de Proserpine (en latin) ou Perséphone (en grec) est l'un des mythes fondateurs de la culture greco-romaine qui permet d'expliquer l'alternance des saisons. Hadès, roi esseulé des Enfers cherche une reine. Conquis par la beauté de la jeune déesse Proserpine, il décide de l'enlever pour en faire sa femme. Or, Proserpine est l'enfant de Déméter, déesse de la terre et des moissons. L'enlèvement de sa fille provoque chez elle une tristesse inconsolable qui se transforme en rage extrême. Cette rage la pousse à déclencher une famine qui menace de faire disparaître les Hommes de la surface de la Terre. La situation est si grave que Zeus intervient. Il décide que pendant six mois, Perséphone vivra sur Terre avec sa mère (printemps et été). Pendant les six autres mois, elle retournera auprès de son mari. 

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Le Bernin, détail de L'Enlèvement de Proserpine, 1621-1622

Le groupe sculpté du Bernin représente le moment précis de l'enlèvement de Proserpine par Hadès. Ce dernier s'est déjà saisi de la jeune femme dont les pieds ne touchent plus le sol. L'une des particularités de cette œuvre demeure dans la position des personnages. L'art italien utilise très fréquemment la position de contrapposto, caractérisé par un basculement languide des hanches qui met le corps en mouvement. Ici, il n'est plus question de langueur mais bien de force brute, avec des corps tordus dans des mouvements extrêmes et des muscles saillants. Le mouvement de Proserpine repousse Hadès et déforme son visage. La peau de ce dernier est étirée sous la pression de la main de la fuyante. Le Dieu tente de retenir la jeune fille avec peine, comme le montrent son déséquilibre et ses doigts s'enfonçant dans la chaire de la jeune déesse.

Ces positions des corps, le travail sur les matières, sur les drapés, la barbe d'Hadès et les cheveux de Proserpine retranscrivent ainsi parfaitement le mouvement suspendu de l'enlèvement où les deux corps s'affrontent.

    

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David

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Le Bernin, David, 1623-1624

Le Bernin a seulement 25 ans lorsqu'il réalise cette œuvre. Il représente David, fils d'Isaï et futur roi d'Israël, lors de son combat avec le géant Goliath. On saisit très vite la tension du héros biblique au moment décisif du lancement de sa fronde qui aurait conduit à la défaite du géant. Aux pieds de David, est représentée la cuirasse prétée par le roi Saül, ainsi qu'un casque et une épée, que le héros a déposée pour combattre le géant nu et sans armes. La harpe avec laquelle il annoncera sa victoire est aussi représentée à ses pieds.

L'innovation du Bernin réside dans le choix original de représenter cet instant, par rapport à d'autres modèles antérieurs comme le David de Michel-Ange (plus statique, dans une position presque méditative). David est ici représenté avec un visage tendu, à l'expression concentrée et soucieuse. Le choix de ce moment permet d'apporter plus de profondeur au personnage et d'introduire plus de mouvement à la sculpture. 

    


Apollon et Daphné

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Pour réaliser cette sculpture, Le Bernin s'inspire de l'une des métamorphoses d'Ovide: la métamorphose de Daphné. Suite au tir d'une flèche de Cupidon, le dieu Apollon tombe fou amoureux de la nymphe Daphné. Seulement, cet amour n'est pas réciproque et la jeune femme lui résiste. Apollon décide alors de la prendre de force, si bien que Daphné s'enfuit. Alors qu'il est sur le point de l'attraper, Daphné implore son père, le dieu Pénée, de lui venir en aide. Ce dernier la transforme alors en laurier.

Le Bernin décide de représenter le moment de la métamorphose mêlant la pression d'Apollon, la peur de la nymphe et sa transformation. Malgré la tension de la scène, le sculpteur réalise cette œuvre en y apportant des sensations de légèreté. Il obtient cela par un travail sur les mouvements suspendus (Daphné semble s'envoler), sur les drapés ainsi que sur les cheveux des deux personnages et les feuilles de lauriers soulevés par le vent.

    

    

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