La Culture de la Canne & la Fabrication du Sucre
Plantation et récolte de la canne
La plupart des vestiges industriels encore visibles sur le domaine ont trait à la fabrication du sucre de canne. La canne, introduite aux Antilles par les Européens lors de la colonisation, était plantée dans les plaines et les mornes les moins pentus le long de la rivière de La Pagerie ; les parties difficilement accessibles ou plus en altitude telles le secteur de Croc-Souris étant réservées à d’autres cultures comme le café et le cacao.La récolte avait lieu de janvier à juin, pendant la saison sèche, une fois la canne arrivée à maturité. La coupe de la canne était assurée par des esclaves maniant le coutelas avec dextérité pour former des piles ou paquets de tronçons de canne ensuite transportés au moulin. Selon l’emplacement des champs, le transport pouvait se faire à tête d’hommes ou de femmes, à dos de mulet ou par cabrouet (charrette).
Le Moulin
Le mot « moulin » désigne indifféremment l’appareil broyeur ou le bâtiment. Le modèle le plus commun aux Antilles était le moulin à bêtes. En 1815, la force motrice était fournie par les 26 bœufs ou 24 mulets de l’habitation qui, dans un mouvement de manège, faisaient tourner un axe vertical solidaire d’un cylindre de fonte appelé «rolle». Ce dernier, par le moyen d’un engrenage, entraînait les deux autres rolles. Les cannes, introduites entre les cylindres, se trouvaient broyées, livrant leur jus dans une gouttière et lâchant les résidus fibreux secs appelés « bagasse ».
Un canal en tuiles apportait le jus vers une gouttière en bois qui, à son tour, le conduisait à la cuve de décantation située en contrebas dans la sucrerie, de l’autre côté du chemin. Un autre canal, plus large et en maçonnerie, recevait la bagasse et l’acheminait vers une des trois cases de stockage près du fourneau de la sucrerie, où elle servait d’excellent combustible en complément du bois.
Pendant la récolte de la canne ou roulaison, les esclaves travaillaient de jour comme de nuit. Le moulin était source d’accidents. Il arrivait que l’inattention ou l’épuisement des esclaves conduisent à ce que la main de l’un deux soit happée avec la canne dans les rolles. L’entraînement du mécanisme par les bêtes ne permettait pas un prompt arrêt de la machine une fois lancée ; il n’y avait alors d’autres alternatives que d’amputer le membre broyé de la malheureuse victime.